L’amour fou…

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à toi, absolument.

"Et je chantais cette romance
En 1903 sans savoir
Que mon amour à la semblance
Du beau Phénix s’il meurt un soir
Le matin voit sa renaissance."
Apollinaire

Un homme m’attend sur le seuil de sa maison, une arme à ses côtés. Un homme seul, assis à l’ombre et que je vois à peine, mais dont je reconnais tout le corps , les yeux fermés, à son odeur de vétiver. Il promène ses yeux sur moi, tend les mains, et m’enlace si près, si près que je ne peux voir son visage.

Je vertige. Je chavire. Et quand je lui ouvre ma robe, je jette en même temps mon âme à ses pieds. Il suffit à justifier mille hérésies, et dans ses bras, je perds le dieu de mon baptême et jusqu’à la mémoire d’autres prénoms d’amour.

La nuit enfante des merveilles. La lune est déchaînée, pleine et ronde. Les lucioles s’allument unes à unes comme des étincelles. Voilà l’ombre et la lumière séparées dans le jardin plein de senteurs.

Je suis cet homme dans sa chambre. L’eau claire de la lune baigne le lit à travers les rideaux. Des feuilles sèches d’eucalyptus, froissées entre les draps, me saoulent d’un parfum sombre. Il m’embrasse et dit mon nom. Plusieurs fois mon nom. Le conjugue de paroles aussi douces que vulgaires, aussi vulgaires que douces. Ses mains rugueuses remontent mes jambes jusqu’à trouver ce triangle, nuage noir de mon désir où je dis oui, et encore oui. Et il y a sa bouche et le feu de sa langue qui me ravagent. Il me met en croix, lèche la trace humide sur la soie du slip. Il dézippe et dégraffe, écarte mon plumage, ordenance mon corps. Viens que je te fasse mal. De face et à l’envers. A l’envers et de face. Viens que je t’apprenne des manières sous tes jolis frou-frous. Et de face et de pile, et de pile et de face.

J’ai les bras déployés, les cuisses en delta et mon sexe est d’amiante. La pierre ponce de sa langue me lèche le fri-fri .

Et je gémis mon syllabaire. B-a- Ba du plaisir. J’accordéonne mes soupirs. Je m’enivre à sa queue. Je la suce et la suce et lorsqu’elle m’envulve, elle touche à mon coeur. Crée en moi un vertige. Elle qui seule peut éteindre en moi cet orage quand il me garde ouverte, coule en moi et m’inonde.

C’est un désir long et brulant qui mêle bouches et membres, une douceur qui entre en moi et soudain me déchire. Je gémis à tout va la chanson, des couleurs chantent en moi et je fais des prières inversées. Je ne reconnais plus ma voix qui crie.

Ah, quelle insolence, cet amour qui récidive. Feu sous la cendre. Vous me croyiez mort et me voilà pourtant. Dans ce lit aux draps usés, éclairé par la lune, il m’a prise sans faire halte, enserré ma taille de ses jambes. Arbre étouffé par des lianes. Au rythme de ma chair et de mon plaisir, remous et secousses au milieu de son lit. Balance, cadence. Ecartelée et gémissante,

je me laisse mourir telle une bête lasse.

michèle voltaire marcelin
pour Amours & Bagatelles

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